Taverne Exotique d'Umîis aux Mille Fleurs : Ouverture

Là où se trouvait l'ancienne Taverne, on vient d'apposer un panneau :

Citation :

Ouverture prochaine de la Taverne Exotique d'Umîis aux Mille Fleurs
Spécialités d'Umîis et de Xaronia
On recherche serveuses, respect des clients garanti

Pour que les Milles Fleurs d'Umîis resplendissent dans votre gosier

Sarwal entra dans la taverne. Sa timidité le fit assoir près de l'entrée. Il attendit pour prendre commande, le soupir au bord des lèvres.

Heksel vit son homme de main entrer, et tout semblait se dérouler comme prévu. Il fit un signe rapide et bientôt, bien qu'il n'y ait pas encore de personnel attitré, la table des deux hommes fut chargé de lourdres choppes. La discussion pouvait alors commencer...

Vois-tu, compagnon, je suis bien en peine. Mon Maître m'a demandé de trouver un grand nombre de plantes originales, et pire encore, de réfléchir à comment en faire des mets et des boissons. Or je ne connais rien à la botanique, ni personne de mon entourage. Ah, quelle malédiction, si seulement je pouvais trouver quelqu'un qui ait un jardin (ou cherche à en établir un à Umîis), je ferais presque n'importe quoi pour le remercier...

Sarwal, jamais très à l'aise dans les discussions publiques, ne pu se retenir d'ouvrir de grands yeux. Il ne pouvait garder son calme.

- Messire! Mon mâitre m'a envoyé ici afin de trouver un lopin de terre où établir notre lieu de culte et notre jardin botanique!

Il prit un peu sur lui pour ce calmer.

- Voyez-vous, nous sommes issus d'une ville lointaine où la flore se compose en partie de champignon et de plantes touchés de gigantisme. Mon maître lui-même m'a appris le nom des herbes et plantes consommables ainsi que leurs effets secondaires.

Il se pencha vers l'homme:

- A vrai dire, je le soupçonne de ne pas vraiment se plaire à Samariis, je crois qu'il veut un endroit où se retirer. Une sorte d'antichambre d'Ambregris.

Il souleva sa choppe:

-Mais je crois que cette rencontre était écrite dans l'algébre du Jeu des Perles de Verre.
Dites-moi en quoi je peux vous aider et je ferai de mon mieux.
Il y a cependant un hic...

Et il repris un air songeur.

Un hic ? Lequel ? Rassurez-moi, rien qu'un terrain d'une valeur de 3000 po ne puisse résoudre...

- Et bien justement.... nous ne trouvons pas de terrain...

Il soupira.

- Même pas un endroit où planter une tente...Cette nuit même j'ai du dormir dan la rue. Quand je me suis réveillé, un homme était mort. Ca aurait pu être le pauvre Sarwal...

Si c'est un terrain en Samarîis, je ne puis rien pour vous; par contre, si c'est en Umîis, je peux vous avoir un terrain dans les jours à venir...

Sarwal jeta à son interlocuteur un regard curieux.

- Oui, je parlais bien d'Umîis... Si vous faites ça je suis prêts à vous rendre service... Je peux par exemple commencer à planter des spores à croissance rapide, avec une bonne pluie ils pousseront rapidement. C'est la saison des morilles-asperges, très bon en entrée.
Pour les mets de luxe -champiboeuf et chanterelles de mer - il faudrait attendre un peu ou trouver du bon engrais...
Je disposerai d'ici là de la somme...
J'espère...

J'en parle à mon Maître !

Il s'approcha d'Heksel et parla avec lui à voix très basse.
Et quand il revint :

Mon Maître envoie immédiatement l'ordre d'achat; vous ne serez cependant pas propriétaires du terrain, mais rassurez-vous, il sera à votre entière disposition. Voilà l'accord : tant que vous fournirez la Taverne, je jure devant les dieux que votre terrain ne vous sera pas refusé; mieux, non seulement vous ne paierez pas de loyer mais nous vous donnerons un pourcentage confortable sur la vente des boissons et mets issus de vos plantes. Par contre, il faudra servir Umîis et la Taverne Exotique : dans moins d'un mois, il faut que l'on dise partout à l'entour qu'Umîis la Dévastée est à présent Umîis la Florissante, et que sa Taverne Exotique est un passage obligé pour tout visiteur un peu curieux...

Sarwal Mortibus vit mille flammes tourner autour de lui en chantant.

- Euh... D'accord, va pour dans un mois. Tenez-moi au courant pour le terrain...

Et il commanda une autre bière.

Lorgnant Eksell du coin de l'oeil, Sarwall s'adonnait à sa passion pour la psychomorphologie. Un front haut, un nez droit, un menton volontaire. Diantre! Peut-être avait-il eu à faire à un filou. Il se concentra pour lire dans ce visage l'avenir du clan du Ludi Magister à Umîis.

- Qu'ai-je fait....? marmonna t-il pour lui-même. Et il tâtait avec impatience le sac en tissus entre ses doigts.

Sarwal se mit à renifler bruyamment. Cette odeur étrange le dérangeait tout en lui rappelant quelquechose. Il leva les yeux de sa bière pour apercevoir la mignifique fleur. Bouche bée, il regarda SOUS la magnifique fleur et vit une magnifique fille.
Les mots lui échapèrent :

- Vous ne trouverez jamais boisson aussi douce que vous...

Rougissant, surpris de sa propre témérité, il replongea son regard dans son verre en tremblant.

Ephédra a écrit:

... Est-il déjà possible de goûter à vos boissons douces ?

Heksel avait quitté la Taverne en prenant soin de la confier à haute voix à Ukiskir, assis à côté de Sarwal; le nouveau gérant, connu pour avoir toujours une petit sourire à la bouche, répondit donc à la jeune notable:

Nous n'avons pour l'instant que peu de ressources, mais je peu d'ors et déjà vous proposer une spécialité de mon pays : le lait de gnou à la girofle.

Puis, du coin de l'oeil, il surveilla les deux hommes et la réaction de la demoiselle : si elle se sentait gênée, il faudrait "inviter" les jeunes gens à aller boire à une autre table.

Sarwal leva un regard plein de gêne vers la dame. Entre deux gorgées, le regard vers ses pieds crasseux, il balbutia :

- Veuillez... excuser mes dires, Ma Dame, qui ont honteusement... dépassé ma pensée...
Je suis impressionné par la beauté de cette fleur, et je... voulai exprimer que son parfum est doux... et calme l'esprit... Pardonnez mes paroles.

Il alla s'assoir un peu plus loin et versa le contenu d'un petit sac sur la table. Des objets roulèrent sur le plateau, brillants comme des perles de feu, des yeux de déesse et des gouttes de rosée. Sarwal bouscula sa chaise en tentant de rattraper ces petites billes délicates.

Ephedra sourit devant la timidité et la maladresse de l'inconnu étranger. Elle est était presque touchée...

- Un homme qui sait reconnaître une fleuve rare ne devrait pas s'excuser de l'admirer. C'est en effet une fleur calme, qui pousse près du fleuve, quand ce dernier le lui permet. Une bien belle symbiose.

Elle fit un signe au tavernier, accompagnant d'un hochement de tête reconnaissant, pour lui signifier qu'elle acceptait avec plasir sa boisson.

- Me voilà encore bien curieuse... le gnou vous dîtes ?

Elle envoya une servante payer la boisson immédiatement, qu'elle avait hâte de gouter.

Mais déjà un nouveau venu. Un djarii samaréen... voilà qui était étrange ! Elle connaissait bien sûr le nom de cette ville des Montagnes grises, Ephedra ayant reçue une éducation digne de son rang. Mais elle n'était jamais sorti d'Umiis... Aussi ces villes ne restaient-elles que des images des croquis sur parchemins.

Citation :

Puis-je vous inviter à prendre un verre, je n'ai malheureusement point eu le privilège de pouvoir converser avec des citoyens de cette douce et enchanteresse cité ?

Une servante se permit de chochuter quelques mots à sa maîtresse, légèrement anxieuse de la voir dans un tel milieu.

- Madame, peut-être devriez-vous ren....

- Laisse-moi donc profiter de ces nouveautés ! Je ne fais... qu'étendre mes relations, que je juge de haute importance, me permets-tu ?

Elle fit légèrement cingler ses derniers mots, pour bien lui faire comprendre que ce n'"était pas sujet à discussion. Déjà qu'Ophrys risquait assurément de la retrouver bien vite... autant qu'elle profite de ce moment intensément.

- Si le lait de gnou vous convient , Sire Raphael, alors je serai vôtre hôte. Je me nomme Ephedra, Fille d'Asclepia et d'Edulis d'Aloysia.
Une congregation de l'Ombre dites-vous ? Dans une Cité de Lumière, voilà une chose bien étrange ! Et quel est donc la fonction de celle-ci ?

Sarwal eut un raisonnement lumineux. Chose qui lui était peu commune.

Il inspira une goulée d'air et se lança :

- En somme, vous vous nommez" congration de l'ombre" car vous ne vouliez pas être reconnus au grand jour. Si vous vous étiez appelé "congrégation de la lumière" vous auriez attiré les ombres comme une lanterne attire des mouches... Mais maintenant que vous n'êtes plus dans l'ombre, vous faites toute la lumière sur ce nom et nous expliquez que votre travail est terminé...
Cependant, et sans vouloir vous faire ombrage, ne songez-vous pas que désormais les démons, attirés par votre retour au grand jour, ne se précipitent pour se venger de votre obscure lutte passée? Surtout si tous vos membres sont des têtes d'ampoules...

Fier de sa réflexion, il voulu poser son menton dans la paume de sa main, mais oublia d'appuyer son coude sur la table. Son lourd visage percuta la table avec fracas.

Humf...

Terrassé par la sensation d'un vide immense, Sarwal repris une bière et commença à dessiner le plan du futur potager devant répondre aux demandes du clan Hitopak. Il pris son crayon vert pour dessiner les engrais verts utilisés : tentacules-épinards et vire-moutarde, qu'il faudrait arracher dans deux semaine. En marron, il traça les parois du bac à compost où seraient recyclés les déchets du restaurant. Dans un mois, il pourrait y planter des potimarrons, melons-grêles et autres auber-gin(base d'un alcool fort aux vertus térapeuthiques). Il fit en bleu une tranchée traversant la zone verte, qui serait un ruisseau artificiel arrosant le jardin. Dans le blanc restant, il inscrivit bon nombres de symboles étranges contenus dans de petits carrés bien dessinés.

Sarwal était concentré sur son dessin mais fut dérangé dans son travail par un courant d'air et une atmosphère tout à coup pesante.
Le frère d'Ephédra, celui dont elle craignait apparemment l'arrivée, ne le priva cependant pas de la présence douce et évanécente de la jolie jeune-fille. L'intéret qu'il semblait éprouver pour Samariis avait, semble t-il, pris le dessus sur tout autre sentiment.
Sarwal était toujours privé de discussion sur l'Art au milieu de ces frères scientifiques et méditatifs, il saisit la perche qui lui était tendue avec enthousiasme.

- Samariis! Vous ne pouvez pas imaginer! s'écria t-il. Certes Umiis m'est plus attachante et merveilleuse, mais durant mon court séjour dans la Cité Deux Fois Née, j'ai vu tant de merveilles!
Et je pense sincérement, bien qu'étant membre d'un clan religieux, que Samariis ne survivrait pas une minute à la dsiparition de ses artistes!
Imaginez.
Imaginez-vous traverser les avenues aux façades majestueuses, sous les pavillons battant leurs broderies multicolores comme les ailes de gigantesques papillon.

Il se leva et mima maladroitement ses dires, emporté par une inspiration trop de fois réduite à néant par sa timidité et le sérieux de ses frères.

Eh! là! A votre droite! derrière une parade de trois-mille militaires, voyez cette princesse venue d'un lointain royaume valser dans ces soieries, inatteignable par le commun des hommes, et songeant en souraitn à son Grand Amour!
et derrière, là!,dles cracheurs de feu, des acrobates dérobeurs de bourses, des dresseurs de chats. Sur une estrade des théâtreux représentent la mort de la belle Ophé-Ly et gémissent en coeur à la face du monde.
Courant tout autour, en criant leurs poèmes, les échassiers parcourent les foules, l'un pleurant la disparition de son amour, l'autre mimant Setras fuyant le champ de bataille.
Alors que vous observez ces merveilles, une voix somptueuse s'éléve. C'est une chanteuse mystique qui ravi les foules béates. Et là! Un rupin passe, dédaigneux, et le légendaire Planchapain lui fait un croc-en-jambes et lui subtilise sa bourse! Et puis...
Et puis...
L'odeur tenace de la taverne du Lion Bleu vous pique les narines, vous n'osez pénétrer en ce repère de malfrats et de brigands. Mais une musique entraînante vous saute au coeur, fuyant d'une porte entrebaillée par deux lutteurs. Attiré, vous entrez timidement, pour entendre quelque légende chantée par un membre de la famille Aldinus, et les troubadours décident de conter chacun une bribe de l'Histoire, chacun plus majestueux et paillard que l'autre, chacun plus triste et doux, et les larmes envahissent les yeux des ivrognes qui pleurent les pertes longtemps oubliées... Et... Et...
Tout à coup une danseuse dénudé entre et virelvolte. Ses seins ballotent en tous sens et son séant décrit dans les nuées de fumées âcres des spirales espiègles. Alors vous la saisissez aux hanches, elle se colle contre vous et plonge ses yeux de braises dans les votres... Et l'alcool, et les pulsions animales, et le parfum entêtant de cette danseuse sacrée, et vos mains sur les rondeurs de son corp, et...

L'emportement, Sarwal, l'emportement! Est-ce lui qui te fais te trémousser ainsi, dans une taverne d'Umiis, face à des personnes que tu ne connais pas et qui semblent de naissance prestigieuse?... Allons, Sarwal! reprends ton air idiot, vois la position obscéne dans laquelle tu te trouves... Vas, vascillant sur tes jambes trop longues, t'assoir l'air ahuri, sur ta chaise. Reste vibrant de tes milles souvenirs, mais tais-les à la face du monde. Pauvre, pauvre Sarwal, tu n'est pas fais pour parler, bois et tais-toi.

En cette fin d'aprés midi, aprés avoir admiré les rues fleuries d'Umiis, ScargotH entra dans la taverne. Il y avait rendez-vous...